Dans
les sociétés modernes, il y a une face visible, mise en valeur,
soulignée parfois pour être louée ou stigmatisée: c'est la
façade économique, le tableau de bord de ce qui marche ou qui a
un effet sur la relation avec les autres pays. Il existe aussi une
face cachée, qu'on ne veut pas voir et qu'on fait semblant de ne
pas entendre: c'est le sort qui est fait à certains individus qui
ne sont pas considérés comme des agents économiques. En dehors
des grands principes et des belles paroles, on fait beaucoup moins
pour le sort des enfants que pour celui des baleines, même s'il
est vrai que l'un importe autant que l'autre pour l'avenir de
l'humanité. Le grand prédateur est l'homme. Aucun cataclysme
prévisible ne menace autant l'humanité dans sa composante
physique morale, et philosophique, que l'homme lui-même.
Tant
qu'il y aura des hommes, nous aurons à craindre sa menace sur
lui-même autant que
sur la nature vivante et la nature inerte.
Il est évident que beaucoup d'organisations et beaucoup de gouvernements s'occupent du sort
des enfants et débattent des mesures à prendre d'urgence pour
leur reconnaître le droit à l'intégrité physique et simplement
le droit à la vie. Le fait est que c'est souvent beaucoup de
paroles, de promesses et d'engagements pour rien.C'est
que les pays dans lesquels les enfants ont le plus à souffrir
sont des pays inorganisés, en proie à des conflits, des
détresses économiques et des guerres; en face de ces situations,
les gouvernements sont impuissants, et les meurtres, les tortures,
et toutes les violences psychologiques continuent de peser
sur les enfants. Cette impuissance donne légitimité à la
réalité quotidienne, et on a parfois l'impression que rien ne
changera jamais.Vivre
dans la rue, subir les tortures de leurs bourreaux, être livrés
à l'esclavage ou à la prostitution organisée, voire au meurtre
volontaire ou hasardeux , tout cela est dans certains pays
"l'état naturel" des enfants à qui on nie toute
"humanité".
Amnesty international met au rang des pays dans lesquels la
maltraitance des enfants est un vrai fait de société: la
Colombie, le Guatemala, le Kenya, l'Ouganda, le Bangladesh l'Inde.
Il n'est pas besoin d'une situation de guerre ou de conflit pour
voir torture, massacre, mutilation des enfants.
Pourquoi la Police de certains pays a-t-elle besoin de torturer
les enfants en Chine, au Brésil, au Paraguay pour ne citer que ces
pays?
Dans la réalité, le sort des enfants n'est que la conséquence
d'une organisation ou d'une inorganisation économique et
politique. Les hauts dignitaires de ces pays sont partie prenante
du système, et ne sont pas bien placés en tant que responsables,
pour commencer à y mettre un terme.
A côté de la guerre, il y a la politique, la religion; la simple
présence d'un enfant en errance, de passage dans une zone de
guerre, peut signifier pour lui torture, mutilation, mort.
Les enfants sous la "protection" de la police sont
automatiquement parfois considérés comme des esclaves et sont
bastonnés, frappés, parqués comme des bêtes, violés, forcés
à combattre.
En face de ce désastre, il
y a les responsables à tous les niveaux. Ils sont installés dans
l'impunité, et continuent à vivre comme vous et nous comme dans
un état normal.
On peut se demander parfois si l'action des ONG est de quelque
efficacité pour la détresse de ces enfants et si une action
d'une autre envergure ne peut être envisagée. Mais pour cela, il
faudrait que la vie de milliers d'enfants vaille plus qu'un baril
de pétrole ou un accord économique au profit de quelques uns.
Alors, ce n'est pas pour demain.
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