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 Anges et Démons en lutte pour les âmes des croyants

   C 'est à l'époque de l'agitation religieuse causée par la réforme que cette superstition produisit ses effets les plus désastreux. Il y eut une véritable épidémie de démonomanie .On ne vit partout que des sorciers et des possédés. On créa des tribunaux pour juger ces malheureux, on dressa des échafauds, on alluma des bûchers pour brûler des milliers de coupables. C'est que le plus souvent, ces sorciers prenaient leurs hallucinations pour la réalité et avouaient les crimes absurdes dont on les accusait et qu'ils n'avaient pas commis. Bien plus, certains sorciers ayant horreur de leurs crimes imaginaires, allaient se dénoncer eux-mêmes et réclamaient le bûcher comme une légitime expiation. Dans la population des sorciers, il y avait beaucoup plus de femmes que d'hommes. On trouvait tout au plus un sorcier pour 50 sorcières: explications populaires: Satan aime les femmes, Les femmes sont naturellement vouées au péché -et la pomme acceptée du démon tentateur a scellé le pacte entre femme et Satan. Disons que les femmes ont été longtemps dans les groupes les moins instruits de la population.
Loin de faire diminuer la vague, les supplices l'ont fait monter. Ils avaient pour effet de frapper les imaginations malades. Sous Charles  X (1550-1574) , il y avait 30 000 sorciers à Paris seulement. A cette époque peu d'hommes même parmi les plus éclairés doutaient de la réalité de la sorcellerie. Il était dangereux de manifester ses doutes. C'est ainsi que Jean Bodin qui était un homme des plus éclairés de son temps, raconte qu'un homme qui surprit sa femme dans une pratique démoniaque, voulut savoir ce qu'il en était. Il observa ses gestes, et après s'être frotté à son exemple d'un onguent particulier, il prononça comme elle aussi les mêmes paroles  magiques.  Il s'est trouvé transporté sur son cheval jusqu'au pied du Vésuve. Il arriva au milieu d'un extraordinaire sabbat parmi un grand nombre de sorciers, sa femme et de nombreux boucs. Il se signa, et aussitôt, toute l'assemblée disparut. Il était alors nu dans la campagne. Il fit la route à pied de Naples à sa ville, Angers . Là,  il dénonça sa femme qui fut brûlée comme sorcière. Cet homme avait sans doute trouvé une bonne façon de se débarrasser de son épouse. Les dénonciations bien entendue non fondées, étaient nombreuses pour toutes sortes de raisons.
Un magistrat de la même époque pensait que le crime de sorcellerie est tellement excepté, qu'il se commet de nuit et en secret, qu'il faut pour le juger une procédure d'exception. Selon cet homme de loi, il faudrait condamner tous  les sorciers malgré les rétractations et les bons sentiments dont ils pourraient témoigner : "Satan ne lâche pas sa proie!" .

Un magistrat remarquable: P.de Lancre


 Cet homme , conseiller au Parlement de Bordeaux a bien servi la cause. A   la tête de la commission chargée de punir les sorciers, il en a fait conduire 500 au supplice dans la même année 1619. Parmi les victimes les plus illustres de cette chasse aux sorcières, on peut citer la maréchale d'Ancre en 1617, et le curé Urbain Grandier en 1634. Il faut attendre Louis XIV pour voir examiner le problème de la sorcellerie avec un début d'esprit cartésien. Le savant chanoine Gassendi se rendit dans une vallée des Basses-Alpes où les adeptes et croyants de la sorcellerie étaient nombreux. Il administra à quelques paysans une préparation dont la formule lui avait été confiée par un sorcier. En la leur administrant, il leur annonça qu'elle devait les transporter dans une assemblée infernale. A leur réveil, les dormeurs qui n'avaient pas quitté leurs lits, firent un récit détaillé du sabbat auquel ils croyaient avoir assisté. Ils donnèrent   même le détail des impressions  qu'il avaient éprouvées. Résultat: En 1672, le conseil du roi Louis XIV  rendit un arrêt qui ordonna la mise en liberté de tous les prétendus sorciers emprisonnés. Cela fit grand bruit et beaucoup de résistance. Le roi tint bon contre des parlements qui prétendaient devoir continuer de poursuivre ce crime imaginaire. En 1750, le jésuite Girard échappa de peu au bûcher du Parlement de Provence. En cette même année, en Bavière, on brûla une religieuse qui avait pratiqué la magie pour faire périr plusieurs personnes, sans y parvenir. La même pratique avait cours en Angleterre, et on pense que  3 000 furent victimes de cette chasse superstitieuse au 17° siècle. Le dernier sorcier fut brûlé en 1722.
Aujourd'hui, le diable ne pactise plus avec personne. Le sorcier de notre temps est un  homme ou une femme qui a une entreprise, qui s'enrichit parfois beaucoup sur la crédulité, la naïveté, la faiblesse d'esprit des contemporains. Parfois aussi le sorcier profite de la détresse de certains pour en tirer profit et les ruiner. De nos jours en tout cas, ils n'ont plus à craindre le bûcher, mais ils méritent souvent la prison.